La dépression et sa représentation dans les séries TV

Je souffre de dépression. C’est un fait. Je ne sais pas depuis combien de temps. En parlant à des professionnel, j’ai l’impression de l’avoir été depuis mon plus jeune âge. C’est douloureux.

Mais le problème de cette maladie, parce que c’est bien une maladie, c’est que les gens ne comprennent pas. On peut être triste mais suffit d’agir non ? Se forcer à sortir, faire du sport, c’est chiant mais possible non ?

Au lieu de vous parler directement de mon expérience, je veux vous partager des extraits de série TV qui m’ont marqué par le fait qu’ils m’ont extrêmement touché par la manière dont j’ai reconnu ma douleur.

Ginny & Georgia

Dans Ginny & Georgia, Marcus parle dans l’épisode 5 de la saison 2 de son expérience. Ce qui est choquant c’est le contraste entre vie mielleuse avec sa toute nouvelle copine et son monologue :

Extrait vidéo : Gros plan sur le visage d'un jeune homme couché dans un lit

Transcript vidéo

Monologue Original :

Some feelings are like old, familiar friends. Depression is like that for me.

When the episode starts, it can be slow at first. An intrusive thought: “I don’t want to be here,” but then it’s gone.

You bat it away like a fly or a bad smell. When it hits you fully though, when you’re really in it, it’s everything. It’s who you are, you’re nothing else.

On the outside, you look the same; smiling and pretending is so much work, but inside, it’s a different story. You start to hate yourself. You’re so alone, so unbelievably alone.

And you can be with someone you love, but you’re not really with them.

We think we know what’s going on with other people, but we don’t.

Everyone’s fighting a battle you can’t see. We all have blind spots.

And you know it’s you. You know there is something wrong with you, and it’s exhausting. So goddamn shitty and exhausting, and it’s helpless.

It’s a void, and existing takes so much energy, you wanna sink into a hole of nothing where no one talks to you and you don’t have to smile or talk or be.

I’ve been here before, gotten out of it before, but the getting out part becomes the room that you remember but aren’t in. And that’s what’s scary.

Monologue Traduit:

Certains sentiments sont comme de bons vieux amis. La dépression est comme ça pour moi.

Quand l’épisode commence, il peut être lent au début. Une pensée intrusive : "Je ne veux pas être ici" mais elle part tout de suite.

Tu l’écartes d’un revers de main comme une mouche ou une mauvaise odeur. Mais quand elle te frappe entièrement, quand tu y es réellement, c’est tout. C’est ce que te es, tu n’es plus rien d’autre.

De l’extérieur, tu es le même; sourire et faire semblant demande tellement d’effort, mais à l’intérieur, c’est une autre histoire. Tu commences à te détester. Tu es si seul, incroyablement seul.

Et tu as beau être avec quelqu’un que tu aimes, tu n’es pas vraiment avec eux.

On pense qu’on sait ce qu’il se passe chez les autres, mais c’est faux.

Chacun se bat contre des monstres qu’on ne peut voir. On a tous des angles morts.

Et tu sais que c’est toi. Tu sais qu’il y a quelque chose de travers avec toi, et c’est fatiguant. C’est putain de fatiguant et merdique, et c’est inévitable.

C’est un vide, et exister prends tellement d’énergie, tu veux plonger dans un trou de rien où personne ne te parle et tu n’as pas à sourire, ou parler, ou être.

J’ai déjà été ici avant, j’en suis déjà sorti auparavant, mais la partie où on s’en sort devient la pièce que tu te souviens sans y être. Et c’est ce qui est flippant.

Mon expérience

Personnellement, je me souviens continuellement de ce moment en sortie accrobranche avec ma famille, où j’avais l’impression d’avoir un plexiglas qui me séparait des personnes que j’aime et de la liesse du moment. Impossible de les rejoindre dans leur bonheur, aucun moyen de partager cette joie ensemble. J’étais seul. Incroyablement seul malgré tout leurs efforts bienveillants.

Euphoria

Je me rappelle plus très bien ce qui nous amène dans l’épisode 07 de la première saison à parler de la dépression de Rue. Rien que le nom de l’épisode résume exactement l’extrait qui m’obsède dans cet épisode : "Les tribulations d’une dépressive qui essaie de pisser". Qu’on soit clair, si elle arrive pas à pisser, c’est surtout dû à sa consomption de drogue. Mais la difficulté de se lever, sortir de sa chambre, se diriger vers les toilettes … c’est un symptôme de la dépression que je connais bien.

Extrait vidéo : Jeune fille couchée emmitouflée dans les draps de son lit devant un ordinateur portable ouvert sur le lit

Transcript vidéo

Monologue Original :

I wanna lay down one moment and then look around the next and realize I have watched 22 straight hours of Love Island over a two day period and yearn for more.

Some people may find that deperessing. I don't.

It is however a good way to measure depression. Because when reality TV begins to feel like work, like final season of Madmen work. You know you're depressed.

Like haven't gotten out of bed to pee in 24 hours depressed.

[…]

The thought of having to stand up exert a hundred and seventy-two muscles each step for 35 feet just so I can sit on cold porcelain and piss out toxins over and over again for the rest of my life, makes the whole concept of living feel like one long sadistic joke.

But the absolute worst part of depression is that even though you're depressed, you're unable to stop yourself from getting worse.

Monologue Traduit :

J'ai envie de me coucher un moment et regarder autour de moi et réaliser que j'ai regardé 22 heurs d'affilé de Love Island pendant 2 jours et que j'en veux toujours plus.

Certaines personnes pourraient trouver cela déprimant. Pas moi.

C'est, par contre, un bon moyen de mesurer la dépression. Parce que lorsque la télé-réalité commence à ressembler à du travail, du type dernière saison de Madmen. Tu sais que t'es déprimé.

[…]

L'idée de devoir se lever pour utiliser cent soixante-douze muscles chaque pas sur 10 mètres seulement pour s'asseoir sur de la porcelaine froide et pisser des toxines encore et encore pour le reste de ma vie donne l'impression que tout le concept de vie n'est qu'une longue plaisanterie sadique.

Mais le pire de la dépression, c'est que même si tu sais que tu es déprimé, tu es incapable d'empêcher ton état de s'aggraver.

Mon expérience

Même à ce jour, j'ai dû mal à regarder les séries que je sais que j'aime… J'ai peur de pas les apprécier à juste titre, ne pas y porter assez attention. Du coup je regarde des vidéos sur Youtube dont je sais que je m'en fou si je rate 15min ou que je ne le regarde pas du tout. Tant que ça happe mon attention et que je puisse oublier de vivre.

En dépression, je peux réussir à me lever après 17h couché, me déplacer, contempler mes toilettes et ma douche, et faire demi-tour car s'asseoir ou attraper le pommeau semble être beaucoup trop épuisant, trop d'effort. Je préfère souffrir et retourner me cacher sous la couette pour ne pas subir la honte